Affaire Findus : la mise en lumière d’un système économique absurde dont les victimes sont nos éleveurs et les consommateurs
Après l’autorisation par l’Europe la semaine dernière de l’importation de viande bovine américaine désinfectée à l’acide lactique, les consommateurs ont découvert médusés ce week-end, les tribulations du minerai de viande européen.
En résumé : Spanghero, le fournisseur français de viande de boeuf du sous-traitant français (Comigel) de Findus (Suède) a commandé du « minerai de viande » à un trader chypriote, lui-même faisant sous-traiter la commande à un traiteur hollandais. Ce dernier a commandé ce « minerai de viande » à un abattoir roumain.
Le « minerai de viande » de bœuf issu a priori d’élevages roumain contenait en réalité du cheval. La marchandise a été livrée à Castelnaudary dans le sud ouest de la France avant de rejoindre Metz puis une usine de transformation au Luxembourg avant d’être distribuée dans 16 pays européens ….
Il est heureux qu’au bout du compte le consommateur n’est mangé que du cheval et très franchement qu’elle est le niveau de certitude à ce sujet ? Du cheval, mais de quelle qualité d’ailleurs ?
Tous se disent victimes. Pour certain, il ne s’agit que d’une fraude. L’ANIA (Association Nationale de l’Industrie Agroalimentaire) déclare : « la traçabilité des produits alimentaires n’est pas remise en cause […]. Nous avons mis en place le meilleur système du monde […]. »Des politiciens découvrent « l’effarant circuit commercial international qui a conduit cette viande dans les assiettes des consommateurs. »
Pour EELV Basse-Normandie, cette affaire a le triste intérêt de lever le voile sur ce qu’est devenue l’économie alimentaire depuis la libéralisation des échanges agricoles par les accords de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995.
L’agriculture et l’alimentation se sont financiarisés. L’alimentaire a désormais ses « actifs pourris » à l’image de la crise internationale des subprimes. Plus personnes n’est responsable de rien et les consommateurs n’ont plus aucune certitude sur ce qu’ils mangent.
Pour Marine Lemasson, porte-parole d’EELV Basse Normandie : « Il est difficile de croire à la viabilité économique et environnementale d’un tel système qui rémunère autant d’acteurs et nécessite des milliers de kilomètres de transports. Au delà d’une fraude éventuelle, il faut s’interroger sur le fonctionnement de cette économie qui se développe au détriment des consommateurs et des producteurs. Faut-il laisser notre alimentation aux mains des traders ? Allons-nous régler ce problème avec 3 nouvelles lignes sur les étiquettes ? L’économie agricole et alimentaire européenne doivent faire l’objet d’un processus de relocalisation et de régulation. »
Pour François Dufour, Vice-président EELV du Conseil Régional de Basse-Normandie en charge de l’agriculture : « La Basse-Normandie est un bassin d’élevage qui souffre tous les jours de cette financiarisation de l’économie agricole. Nos fermes et nos éleveurs disparaissent alors que les consommateurs bas-normands consomment à leur insu du cheval roumain dans leurs lasagnes achetées au supermarché … les premiers soupçons étant apparus au mois d’août 2012 …
L’agriculture est entrée en 1995 dans les accords de l’OMC. Durant les négociations préalables à Seattle, Doha et Cancun, j’ai personnellement entendu les délégués des pays européens se vanter dans les couloirs « de doubler le nombre de camions mis sur les routes en Europe ».
Ce nouveau scandale doit inciter le gouvernement français à promouvoir une autre forme de développement agricole rapprochant producteurs et consommateurs, à défaut, compte tenu de l’opacité de tous ces acteurs et de ces échanges, le pire est sans doute à venir pour les consommateurs. »