Pour une Contribution Climat Energie écologiquement efficace et socialement juste

Contribution de la Commission  Economie, Social, Services Publics des Verts sur la Contribution-Climat-Energie

Le changement climatique est en marche, la fonte des glaces s’accélère menaçant directement plus d’un quart de la population mondiale et risquant de perturber fortement le climat de l’Europe, ses précipitations, son agriculture, ses forêts…

Il n’y a aujourd’hui plus de temps à perdre. Si nous voulons diminuer de 40 % nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020, comme l’estiment nécessaire les experts du GIEC, la Contribution Climat Energie est l’un des instruments indispensables à mettre en œuvre. Non pas pour créer un impôt de plus et renflouer les caisses de l’Etat, non pas pour punir les consommateurs d’énergie, mais pour donner un prix au Carbone et rendre ainsi rentables les techniques qui préservent notre climat . Le développement de ces secteurs – énergies renouvelables, isolation –  dépend en effet aujourd’hui d’un différentiel avec le prix du pétrole trop volatile pour donner la visibilité nécessaire à des investissements conséquents.

En mettant en place une Contribution Climat Energie, la France ne fait d’ailleurs que rattraper son retard en matière de fiscalité énergétique. Car si la fiscalité des carburants  est effectivement élevée (la TIPP représente 155 euros par tonne de C02, ce qui fait de la France le 4ème pays en Europe pour la fiscalité sur les carburants), le fioul domestique est en moyenne deux fois moins taxé, et le gaz est quasiment totalement exonéré. L’OFCE estime ainsi le niveau de fiscalité environnementale de la France à 2,3 % du PIB en 2006, au 21 ème rang des 27 pays européens.
Pour amplifier son effort de réduction des gaz à effet de serre, la France a besoin d’une Contribution Climat Energie . Les émissions de CO2 des transports, des logements et des bureaux continuent à progresser  inexorablement (+22% entre 90 et 2005 pour les transports, +15 % pour le résidentiel et les bureaux). Et c’est pour diminuer ces émissions « diffuses » que la Contribution Climat Energie est nécessaire.

Mais pas n’importe quelle Contribution Climat Energie ! Nous soutenons une Contribution Climat Energie écologiquement efficace et socialement juste.

Ecologiquement efficace, cela suppose d’entrée un niveau suffisant pour susciter de vraies économies d’énergie.

En proposant 14 euros par tonne de CO2, le premier ministre sacrifie l’efficacité de la mesure. Pour prendre un exemple concret, le retour sur investissement de l’isolation d’un logement, c’est aujourd’hui environ 10 ans. C’est long, trop long pour des propriétaires qui le plus souvent ne restent pas aussi longtemps dans leur logement. A 32 euros la tonne de CO2, on gagne 2 ans de retour sur investissement. C’est une vraie différence qui peut inciter beaucoup de propriétaires à faire des travaux. A 14 euros, on ne gagne même pas un an sur le temps de retour sur investissement.  Peu de propriétaires seront incités à réaliser l’investissement pour isoler leur logement !

Et parce que l’incitation à faire des économies d’énergie est beaucoup plus faible, à 14 euros, l’impact sur les émissions de CO2 est estimé au mieux à -3,3 % en trois ans. On est loin de la « révolution » annoncée par Nicolas Sarkozy en cloturant le Grenelle de l’environnement. 32 euros aujourd’hui (et 100 euros en 2030), c’est le niveau de contribution nécessaire selon la conférence de consensus animé par Michel Rocard, pour remplir les objectifs fixés par le gouvernement lui-même, c’est-à-dire la division par 4 des émissions de gaz à effet de serre – objectifs qui nous paraissent déjà trop faibles. A 32 euros, on peut espérer – 7,5 % en émissions de CO2 à 3 ans, et -14% en 2020 (pour un prix de la tonne C02 qui aura alors atteint 56 euros).

En partant d’un prix de 14 euros, la seule façon de tenir les engagements de diminution des émissions de GES du gouvernement serait d’augmenter de 15 % son montant par an pour qu’elle atteigne 56 euros en 2020 ! Donc soit une augmentation très forte est programmée dans les années qui viennent, soit le gouvernement doit avoir le courage de dire qu’il ne tiendra pas les objectifs qu’il s’est fixés.

Une Contribution Climat Energie écologiquement efficace, c’est aussi une contribution qui concerne l’électricité.

Avec  la FNH et le Réseau-Action-Climat, nous demandons que l’électricité soit soumise à la Contribution Climat Energie. Que veut faire le gouvernement en excluant l’électricité de l’assiette de la Contribution Climat Energie ? Laisser croire encore que l’électricité française, grâce au nucléaire, n’émettrait pas de gaz à effet de serre ? La production d’électricité, c’est 8,1 % des émissions de CO2 françaises (source Citepa 2007). Et si le secteur de l’electricité est soumis au marché européen des quotas Carbone, l’existence du tarif réglementé qui concerne 90 % des consommateurs, annule de fait tout signal-prix qui pourrait en réduire la consommation. Appliquer une « taxe Carbone » au gaz et au fioul, et non à l’électricité, reviendrait en définitive à favoriser le développement de l’électricité, une énergie qui alourdit la facture de chauffage des particuliers et génère des émissions de gaz à effet de serre particulièrement importantes pendant les périodes de pointe.
Les Verts veulent également une Contribution Climat Energie socialement juste.

Les Verts demandent le reversement des recettes de la Contribution Climat Energie prélevée sur les particuliers aux particuliers sous conditions de ressources. Nous demandons au gouvernement de respecter les engagements pris dans le cadre de l’article 2 du Grenelle (I) qui prévoit que la Contribution Climat Energie « sera strictement compensée par une baisse des prélèvements obligatoires de façon à préserver le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises ».

Pour cela et afin de s’assurer que les recettes prélevées seront bien reversées, les Verts demandent la création d’un Fonds Climat dédié à la gestion de la Contribution Climat Energie. Ils demandent également le reversement aux ménages sous forme d’un chèque vert forfaitaire de 200 euros par ménage (pour une CCE à 32€ la tonne), pour tous les ménages en dessous du revenu médian. Dans ces conditions, la moitié des ménages qui gagnent le moins, y compris ceux qui habitent en zone rurale, seront gagnants !

Car aujourd’hui ce ne sont pas les plus modestes qui consomment le plus d’énergie, bien au contraire. Aujourd’hui les 20% les plus pauvres dépensent en moyenne 1800 euros par an par ménage pour leur énergie, là ou les 20% les plus riches dépensent 3000 euros par an par ménage. Si l’on redistribue à tous la même somme, les plus modestes seront gagnants, et les plus riches devront payer. Se battre contre la taxe Carbone, c’est aujourd’hui protéger les intérêts des conducteurs de 4×4 ! Le chèque vert, c’est au contraire permettre une redistribution de ceux qui polluent le plus, les plus riches, vers ceux qui polluent le moins, les plus modestes.

Nous demandons aussi que le reste des sommes collectées sur les ménages (1,3 milliards d’euros) soient consacrées à des subventions aux économies d’énergie, et notamment à l’isolation thermique et à l’amélioration des transports en commun, pour permettre à tous d’alléger des dépenses énergétiques qui sont aujourd’hui, pour beaucoup, des dépenses contraintes.

Il ne faut pas se tromper de combat. Il ne s’agit pas de se battre CONTRE la taxe Carbone, qui est aujourd’hui un instrument indispensable si nous voulons lutter contre le changement climatique, mais de se battre POUR un reversement intégral aux ménages sous conditions de ressources. Nous ne pouvons pas repousser encore à plus tard la réponse aux enjeux climatiques, il faut aujourd’hui se battre pour  une Contribution Climat Energie  écologiquement efficace et socialement juste.

Questions/réponses sur la Contribution Climat Energie

1. L’agriculture est-elle couverte par la Contribution Climat Energie ?

À priori, il n’est pas prévu de l’exclure du champ de la CCE.

2. Les émissions de gaz à effet de serre autres que le CO2 peuvent-elles être concernées ?

Non, à ce stade, mais une étude devrait être demandée à l’ADEME dans ce sens, ce qui laisse penser que des dispositifs pour limiter les émissions des autres gaz à effets de serre pourraient voir le jour dans les années qui viennent.

3. Que se passe-t-il pour les locataires ? Quelle est l’efficacité de la mesure pour des locataires qui ne peuvent pas isoler leur logement, ou pour les habitants des zones rurales ou de banlieue qui doivent se rendre à leur travail tous les jours en voiture ?

Aujourd’hui, les propriétaires sont plus incités à faire des travaux d’isolation depuis la loi Boutin du 25 mars 2009, qui pose le principe d’une rétrocession par le locataire d’une partie des gains réalisés sur sa facture énergétique (20 euros forfaitaires ou la moitié de l’économie réalisée). Cette disposition va favoriser l’isolation des logements en location, mais cela ne permet pas au locataire de déclencher des travaux d’économies d’énergie.

Pour ce qui est des dépenses de chauffage des locataires, comme des trajets des habitants en zone rurale, oui, il existe des dépenses contraintes, et des inégalités géographiques, mais

  • d’une part, les marges de manoeuvre existent. On a bien vu qu’avec l’augmentation du prix du pétrole en 2008, la consommation de super a diminué de 8 % ! Pourquoi ? parce que les français ont modifié leurs habitudes de conduite et ont privilégié d’autres modes de transport que la voiture.
  • d’autre part, les plus captifs d’entre nous sont aussi les plus pauvres et les plus pauvres vont y gagner, grâce au chèque vert. C’est bien pour cela que nous proposons un chèque vert de 200 euros, et des subventions aux économies d’énergie.

4. Le dispositif est-il pédagogique ? Personne ne connaît le nombre de tonnes équivalent CO2 qu’il émet.

Le dispositif est très simple, il s’agit d’une taxe appliquée à la consommation de carburants, fioul, … or c’est une consommation que les français et les entreprises suivent particulièrement.

5. L’industrie va-t-elle être concernée ? Cela pose-t-il des problèmes de compétitivité internationale ?

Toutes les entreprises soumises au Système européen d’échange des quotas Carbone devraient être exonérées. Cela représente 90 % des émissions de l’industrie. Ce point fait relativement consensus à partir du moment où il est acté que les quotas, jusqu’ici gratuits, vont être mis aux enchères, ce qui revient à une taxation des émissions Carbone.

A noter que si la compensation pour les entreprises se fait par une suppression de la taxe professionnelle, on va de fait assister à un transfert de fiscalité du tertiaire vers l’industrie. Car aujourd’hui la TP est essentiellement payée par l’industrie.

6. Y-a-t-il un « double dividende » à espérer d’un transfert de la « fiscalité » travail vers la fiscalité environnementale ?

Oui, le Minefi estime le gain de croissance potentielle à 0,5 %.

7. Quelle est la position des organisations syndicales sur la Contribution Climat Energie ?

La CGT et la CFDT sont pour la taxe Carbone.  Mais la limite, c’est les exonérations de charges sociales en compensation de la Contribution-Climat-Energie des Entreprises.

8. La Contribution-Climat-Energie est-elle un « impot injuste » ?

Fondamentalement non, une redistribution forfaitaire implique nécessairement que les ménages les plus modestes sont gagnants.  On voit bien sur le tableau ci-joint que les menages modestes, même en zone rurale sont gagnants si on redistribue forfaitairement à tous les ménages la même somme.

Retrouver l’article original et bien d’autres sur le site de la Commission  Economie, Social, Services Publics des Verts

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